Contrôle du blocage administratif des sites : la personnalité qualifiée présente son 4e rapport d’activité
M. Alexandre LINDEN, personnalité qualifiée désignée pour opérer le contrôle du blocage administratif des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie, ou à caractère pédopornographique, a présenté son 4e rapport d’activité (1er mars 2018 – 1er février 2019).
Rappel du cadre légal
La loi du 13 novembre 2014 relative à la lutte contre le terrorisme permet le blocage par l’autorité administrative des sites Internet provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie ainsi que des sites contenant des représentations de mineurs à caractère pornographique. Elle permet également des mesures administratives de retrait et de déréférencement de ces mêmes contenus, adressées par l’autorité administrative aux éditeurs, hébergeurs et moteurs de recherche.
Afin d’éviter toute mesure qui serait disproportionnée ou abusive, la loi soumet le dispositif au contrôle d’une personnalité qualifiée désignée par la CNIL en son sein. Les membres de la CNIL ont désigné M. Alexandre LINDEN, conseiller honoraire à la Cour de cassation et membre de la CNIL depuis février 2014, pour remplir cette mission.
La mission de contrôle du blocage
La personnalité qualifiée vérifie le bien-fondé des demandes de retrait de contenus et de blocage formulées par l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC). Pour ce faire, des moyens techniques dédiés, permettant d’accéder aux sites bloqués ou aux contenus de services de communication au public en ligne sont mis à sa disposition. Des personnels de la CNIL l’assistent dans l’exercice de sa mission.
Bilan de la quatrième année de contrôle
Le rapport présenté porte sur la période du 1er mars 2018 au 1er février 2019.
25 474 demandes (-34 %) de l’OCLCTIC visant à restreindre l’accès à des contenus à caractère terroriste ou pédopornographique ont été vérifiées par la personnalité qualifiée, qui se décomposent de la façon suivante :
- 879 demandes de blocage de sites (+ 15 %) ;
- 18 014 demandes de retrait de contenus (- 48 %) ;
- 6 581 demandes de déréférencement d’adresses électroniques (+ 111 %).
On constate que les contenus à caractère pédopornographique représentent 91 % des contrôles opérés, alors que les contenus à caractère terroriste sont passés de 85 % en 2017 à 9 % en 2018.
La baisse du nombre de demandes faites par l’OCLCTIC en matière de retraits de contenus à caractère terroriste, s’explique principalement par le fait que la production de contenus de propagande du groupe terroriste Daech a fortement baissé. A cela s’ajoute la diminution du nombre de signalements reçus par la plateforme PHAROS en ce domaine, vraisemblablement due à la diminution sur la période du nombre d'attaques terroristes sur le territoire français.
La décision du tribunal administratif du 4 février 2019
Sur saisine de la personnalité qualifiée en février 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé le 4 février 2019 plusieurs décisions de l’OCLCTIC. Il a estimé que les faits en cause n’étant pas des actes de terrorisme, les publications ne pouvaient être constitutives de l’infraction de provocation ou d’apologie à commettre des actes de terrorisme.
Les deux recommandations de 2018
La recommandation du 11 juin 2018 portait sur l’absence supposée de mise à jour par l’OCLCTIC de la liste d’urls déréférencées, un site « suspendu ou non activé » où avait été initialement publiée une image à caractère pédopornographique n’ayant pas été supprimé de cette liste. Il s’avère qu’en réalité, l’url en cause avait été re-référencée et cette recommandation s’est finalement avérée sans fondement.
La recommandation du 17 décembre 2018 concernait une demande de retrait et de déréférencement d’un contenu publié sur un compte Twitter. La personnalité qualifiée a considéré qu’il s’agissait d’un contenu à caractère parodique, l’objectif de l’auteur étant de faire rire ou sourire le lecteur. Cette recommandation a été suivie par l’OCLCTIC.
La question de l’amélioration des conditions pour garantir un contrôle effectif
Les préconisations mentionnées dans les trois premiers rapports d’activité n’ont pas été prises en compte par les autorités publiques, que ce soit le législateur (désignation d’un suppléant, encadrement légal des modalités de contrôle des différents acteurs du dispositif mis en place) ou le Gouvernement (renforcement des moyens humains à même d’assister la personnalité qualifiée au sein des services de la CNIL).
Il convient néanmoins d’insister sur les conséquences de l’insuffisance des moyens humains, nécessaires à l’accomplissement de la mission de la personnalité qualifiée : cette situation compromet l’effectivité de son contrôle sur l’ensemble des demandes de retrait de contenus, de blocage ou de déréférencement.