Contrôle du blocage administratif des sites : la personnalité qualifiée présente son 5ème rapport d’activité
M. Alexandre LINDEN, personnalité qualifiée désignée pour opérer le contrôle du blocage administratif des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie, ou à caractère pédopornographique, présente son 5ème rapport d’activité (2 février – 31 décembre 2019).
Rappel du cadre légal
La loi du 13 novembre 2014 relative à la lutte contre le terrorisme permet le blocage par l’autorité administrative des sites internet provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie ainsi que des sites contenant des représentations de mineurs à caractère pornographique. Elle permet également des mesures administratives de retrait et de déréférencement de ces mêmes contenus, adressées par l’autorité administrative aux éditeurs, hébergeurs et moteurs de recherche.
Afin d’éviter toute mesure qui serait disproportionnée ou abusive, la loi soumet le dispositif au contrôle d’une personnalité qualifiée désignée par la CNIL en son sein. Les membres de la CNIL ont désigné (et renouvelé le 21 février 2019) pour remplir cette mission M. Alexandre LINDEN, conseiller honoraire à la Cour de cassation et membre de la CNIL depuis février 2014.
La mission de contrôle du blocage
La personnalité qualifiée vérifie le bien-fondé des demandes de retrait de contenus et de blocage formulées par l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC). Pour ce faire, des moyens techniques dédiés, permettant d’accéder aux sites bloqués ou aux contenus de services de communication au public en ligne sont mis à sa disposition. Des personnels de la CNIL l’assistent dans l’exercice de sa mission.
Bilan de la cinquième année de contrôle
Le rapport présenté porte sur la période du 2 février au 31 décembre 2019.
18 177 demandes (- 29% par rapport à 2018*) de l’OCLCTIC visant à restreindre l’accès à des contenus à caractère terroriste ou pédopornographique ont été vérifiées par la personnalité qualifiée. Les contenus à caractère pédopornographique représentent 68% des contrôles opérés.
Les contenus se décomposent de la façon suivante :
- 420 demandes de blocage de sites (- 53 %) ;
- 11 874 demandes de retrait de contenus (- 34 %) ;
- 5 883 demandes de déréférencement d’adresses électroniques (- 11 %).
La nette diminution constatée entre 2018 et 2019 du nombre de demandes de retrait, de déréférencement et de blocage de contenus s’explique d’une part, par le nombre beaucoup plus faible de contenus publiés sur Internet par les organisations terroristes et par leurs sympathisants, d’autre part, en raison des actions coordonnées par EUROPOL en 2019, qui ont fortement impacté certains vecteurs de diffusion utilisés par les terroristes (par exemple TELEGRAM).
Aucune recommandation n’a été adressée au ministère de l’intérieur.
Bilan de l’exercice de la fonction de personnalité qualifiée
Au terme de cinq années d’exercice de la fonction de personnalité qualifiée chargée d’apprécier le bien-fondé des demandes formulées par l’OCLCTIC de retrait, de déréférencement et de blocage de contenus à caractère terroriste ou pédopornographique, et alors que cette mission devrait être confiée à compter du 1er janvier 2021 à une personnalité qualifiée du Conseil supérieur de l’audiovisuel, plusieurs constats peuvent être opérés :
- L’activité de contrôle s’est très largement opérée sur des contenus à caractère pédopornographique ; aucune divergence d’interprétation n’est apparue en cette matière entre l’OCLCTIC et la personnalité qualifiée.
- Le volume des contenus à caractère terroriste à contrôler était directement lié aux attentats perpétrés sur le territoire national et à l’activité des groupements à caractère terroriste. L’immense majorité de ces contenus ne posaient aucun problème : s’agissant très souvent de la propagande d’organisations terroristes, la provocation à la commission d’actes de terrorisme ou leur apologie était évidente.
- Seules 11 recommandations ont été notifiées au ministère de l’intérieur. Toutes concernaient des contenus à caractère terroriste, sur un nombre total de 50 637 demandes de l’OCLCTIC en la matière. Le nombre de contentieux portés devant la juridiction administrative est infime (jugement du 4 février 2019 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise annulant, à la requête de la personnalité qualifiée, des mesures du ministère de l’intérieur).
- Le très faible nombre de désaccords est lié à la qualité de l’analyse opérée par l’OCLCTIC sur le contenu des sites en cause, notamment par la prise en considération du contexte.
Si l’OCLCTIC a constamment respecté le principe de proportionnalité applicable en matière d’atteinte à la liberté d’expression, on peut penser que la seule existence d’un contrôle par une personnalité extérieure n’y est pas étrangère.